Montées de « Chemot »

Naissance et vocation de Moïse.

1) Récit des origines de l’esclavage des Hébreux, initialement au nombre de 70 descendants de Jacob, avant de connaitre une forte croissance démographique qui inquiète le Pharaon. Impôts spéciaux, corvées, servitude et extermination des nouveau-nés mâles, constituent les mesures adoptées par le Pharaon. Les deux sages-femmes désobéissent au Pharaon et ne tuent pas les mâles à leur naissance. Au procès de Nuremberg, il fut rappelé aux « dignitaires » nazis, que se réfugier derrière les ordres des supérieurs hiérarchiques pour commettre des crimes abominables, était un argument de défense irrecevable.

2) Le Pharaon demande alors à tous ses sujets de noyer les garçons dans le Nil. La mère de Moïse (qui ne porte pas encore ce nom, qui lui sera donné par celle qui le recueillera, et qui signifie « tiré » de l’eau), ne pouvant plus le cacher, le dépose sur le Nil dans un panier. La fille de Pharaon le trouve et en fait son fils. Elle prend pour nourrice la propre mère de Moïse, Yokhébed.

3) Moïse rejoint ses frères hébreux, témoin de leur servitude. Il tue un égyptien qui molestait un hébreu. Dénoncé au Pharaon, Moïse s’enfuit à Midian où il épouse une des sept filles de Yitro (« une fille à marier, mon Dieu quel souci ! »Alors sept !), Tsipora. Elle lui donne un fils, Guerchom. Dieu « se souvient » de son peuple. Dieu peut-il oublier ? « Il a porté son cœur sur eux. Il n’a pas détourné ses yeux (pour faire comme s’il ne les voyait pas) » (Rachi sur Exode II, 25).

4) et 5) Révélation de Dieu à Moïse au « buisson ardent ». S’ensuivent d’âpres négociations afin de convaincre Moïse d’accepter la mission de libérer Israël de l’esclavage. Dieu adjoint Aaron à Moïse.

6) Moïse quitte son beau-père avec sa femme et son fils pour se rendre en Egypte. Tsipora sauve son mari de la mort en pratiquant la circoncision de leur fils, omise par Moïse. Dieu n’avait pas toléré que Moïse tarde à circoncire son fils dès que cela lui était possible. Israël a foi en la promesse de Dieu de les délivrer, transmise par Moïse.

7) Pharaon durcit les conditions de travail des Hébreux en représailles à l’ingérence de Moïse et d’Aaron. Moïse se révolte contre Dieu, son intervention sur ordre divin ayant aggravé les conditions de vie de ses frères.

La relation entre la Haftara et la Paracha :

Le prophète Jérémie se lamente d’avoir été prédestiné à la vocation prophétique, lourde à assumer, et contre son libre arbitre. Notre Paracha témoigne de la contrainte exercée par Dieu sur Moïse afin qu’il « accepte » la mission de libérateur du peuple hébreu. L’un comme l’autre n’ont pas le choix.

Etincelles de mémoire :

La littérature comme la cinématographie a usé et abusé du thème du sauveur qui, par une ironie de l’histoire, grandit au sein même des persécuteurs, causant leur perte. Moïse grandira à la cour, sauvé par la fille de Pharaon, « au nez et à la barbe » de ce dernier. L’on retrouve également le thème corollaire des oracles qui annoncent la chute du tyran s’il ne parvient pas à supprimer celui qui causera sa fin. Ainsi, Pharaon décrète-t-il que tous les nouveau-nés mâles des Hébreux seront noyés dans le Nil, parce que ses mages ont prédit que le libérateur périra par l’eau. Leur prédiction manquait de clarté, car, malheureusement, Moïse fut effectivement condamné à ne pas entrer en terre d’Israël à cause de l’eau (« les eaux de la querelle » : voir la Parachat H’ouqat, dans Les Nombres). Rav Ya’acov Israël Kaniewski, dit le Steipeler 1, (que le souvenir du juste soit bénédiction), observe que lorsque Dieu a décidé quelque chose, tout effort de l’homme sera vain, ne faisant que précipiter la volonté divine. Ainsi, c’est précisément parce que le Pharaon voulait éliminer le futur sauveur d’Israël, qu’il a décrété la mise à mort de tous les mâles hébreux ; ce qui a conduit Moïse chez la fille du Pharaon, lui permettant de grandir dans les palais du roi égyptien.

Etincelles de réflexion :

– Que vient nous enseigner le verset qui évoque les 70 descendants de Jacob qui vivaient en Egypte, en nous indiquant que « Joseph était en Egypte », ce que nous savions déjà, d’autant plus que ce dernier fait partie des 70 descendants susmentionnés ?
La réponse de Rachi est d’une actualité brûlante lorsque l’on songe au défi de l’assimilation auquel nous sommes tous et toutes confrontés en diaspora : « … c’est pour te faire connaître la vertu de Joseph. C’est le même Joseph qui menait paître les brebis de son père, le même Joseph qui était en Egypte et qui est devenu roi. Il ne s’en est pas moins maintenu dans sa vertu ».
– Le Malbim (1809-1879) relève l’existence de « justes » égyptiens, jusqu’au sommet du pouvoir (la propre fille de Pharaon qui recueillit Moïse), qui refusèrent d’obéir au génocide masculin programmé par le Pharaon.
– Le « buisson ardent » au sein duquel Dieu se révèle à Moïse, buisson qui brûle sans se consumer, a fait l’objet de nombreuses exégèses. Citons-en une : la pérennité et la survie du peuple juif en exil, qui brûle/souffre mais ne se consume pas, c’est-à-dire, ne disparaît pas.

1 L’un des grands maîtres du XXème siècle, décédé il y a un peu plus de vingt ans. Son fils, Rav Haïm Kaniewski, qui réside à Bné Brak, est très connu.

Voir aussi :
Lectures de « Chemot » (GRJO)
Je serai Qui Je serai
La chaussure ôtée

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