Montées de « Va’era »

Nous reproduisons l’article de 2015 qui avait été dédié …
À la mémoire des victimes des attentats des 7, 8, 9 Janvier 2015

Citation de la semaine :
Peu de temps après la mort de Rabbin Moché de Kobryn, à l’un de ses disciples, le vieillard de Kotsk, Rabbi Mendel demanda : « Pour votre maître, le plus important qu’était-ce ? » Le disciple réfléchit un moment, puis il dit : « La chose la plus importante était celle, justement, dont il s’occupait. »

Les sept premières plaies d’Egypte

1) Dieu demande à Moïse d’annoncer au peuple hébreu sa délivrance prochaine. L’esclavage est si harassant que les béné Israël ne trouvent pas de consolation dans cette annonce. Moïse en déduit que le Pharaon sera encore moins sensible à ses appels « let’s my people go ! ».

2) La Torah revient sur la filiation de Moïse et d’Aaron, au sein de la tribu de Lévi.

3) Moïse revient sur des difficultés d’élocution et son incidence quant à sa force de persuasion sur le Pharaon. Il s’agit du passage type qui requiert une étude approfondie afin d’élucider l’utilité de cette réitération du texte (le commentaire de Rachi en VI, 30, nous laisse sur notre faim). Dieu avertit Moïse qu’il endurcira le cœur de Pharaon. Moïse était alors âgé de 80 ans, tandis qu’Aaron avait 83 ans.

4) Récit des plaies du sang et des grenouilles, après l’épisode du bâton d’Aaron qui avale les bâtons des magiciens de Pharaon. Le Pharaon « endurcit son cœur », refusant d’obéir à l’ordre de Dieu de laisser les Hébreux quitter l’Egypte. C’est Aaron et non Moïse, qui frappe le Nil, transformant son eau en sang, et en faisant surgir les batraciens, car Moïse a dû son salut au Nil (voir la Paracha précédente, Chemot). C’eût été une forme d’ingratitude (commentaire de Rachi). Pharaon demande à Moïse et à Aaron d’écarter les grenouilles de lui et de son peuple.

5) Moïse agrée à sa supplique. Récit de la plaie de la vermine, et mise en garde avant la plaie des fauves. Les magiciens de Pharaon ne parviennent pas à reproduire la vermine, alors qu’ils étaient parvenus à imiter les précédents fléaux.

6) Plaies des fauves et des ulcères.

7) Plaie de la grêle.

La relation entre la Haftara et la Paracha :
Prophétie d’Ezéchiel sur l’asservissement de l’Egypte par Nabuchodonosor (le destructeur du 1er Temple de Jérusalem). Thème qui fait écho aux plaies qui s’abattirent sur l’Egypte, dont traite notre section hebdomadaire. L’on relèvera que les prophéties ne concernent pas exclusivement les Hébreux, mais peuvent concerner le destin des autres nations.

Etincelle de mémoire :

Les quatre coupes de vin que nous buvons le soir de Pessah’, lors du Seder, ont été instituées par nos Sages sur le fondement du début de notre péricope (versets 6 et 7 du chapitre 6). En effet, l’on y trouve quatre termes de délivrance employés par Dieu : faire sortir, sauver, délivrer et prendre (pour peuple). Nos Sages enseignent également que ces quatre verbes ne font pas seulement référence à l’exil en Egypte, mais aux quatre exils d’Israël qui suivirent : ceux de Babylone, des Perses et des Mèdes, de la Grèce et de Rome, ce dernier étant censé durer jusqu’à l’avènement messianique.

Etincelles de réflexion :

Cette Paracha comporte un des commentaires les plus étranges de Rachi (1040-1105).En réalité, c’est la pertinence de ce commentaire qui pose problème. En effet, le premier verset de Vaéra énonce : « Je suis apparu à Abraham, à Isaac et à Jacob…» (Exode VI, 3). Exégèse de Rachi sur le mot vaéra (« Je suis apparu ») : « Aux pères ». Nous ignorions donc qu’Abraham, Isaac et Jacob sont nos patriarches ? Plusieurs réponses ont été proposées, notamment par le Rabbin Yéhouda Léon Askénazi (Manitou), dans Ki Mitsion, notes sur la paracha, qui fournit trois réponses, la première, formelle, provenant du commentaire Sifté H’akhamim sur Rachi, étant celle qui présente le moins d’intérêt sur le plan du signifiant (1). J’ai trouvé une quatrième réponse dans un recueil de commentaires sur les Parachot, dénommé en français, Perles de rosée, au nom de Rav Méir de Przemysl (heureusement que je n’ai qu’à l’écrire et pas à l’énoncer oralement…). Je le cite : « L’intention de Rachi, est peut-être de souligner les accomplissements individuels et la valeur de chacun de ces ancêtres. Leur mérite ne réside pas tant dans leur lignée qu’en eux-mêmes. Chacun d’eux a été un Patriarche de par ses propres vertus, et non simplement un « fils », ou un successeur et héritier spirituel du précédent ». Très belle exégèse que les H’assidim ont étendu à chacun et à chacune d’entre nous, en affirmant que la pérennité du peuple juif à laquelle nous contribuons, ne dépend pas tant d’une fidélité à nos parents entendue comme l’imitation pure et simple de ce qu’ils furent, que d’une volonté d’apporter au monde ce que nul autre que nous ne peut apporter et qui justifie notre naissance, et donne un sens particulier à notre existence, pour reprendre une très belle idée de Martin Buber, dans son livre « Le chemin de la vie ». « Lorsque je quitterai ce monde », disait un maître h’assidique du nom de Zoussia, « l’on ne me demandera pas pourquoi n’as-tu pas été Abraham, Isaac ou Jacob, mais pourquoi n’as-tu pas été Zoussia ? ».

(1) J’invite les lecteurs et lectrices à consulter les deux autres réponses de Manitou, qui sont pleines de sens.

Rabbin Michael Azoulay

Voir aussi :
Lectures de « Vaera » (GRJO)
Les sept premières plaies d’Egypte

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