Montées de « Toledot »

Jacob, ou la substitution

1) Stérilité de Rebecca guérie par la prière. Elle met au monde deux frères jumeaux, très différents physiquement et moralement, dont la rivalité était déjà présente au stade fœtal. Le premier-né est appelé Esaü (Esav), le second, Jacob (Ya’acov). Esaü vend son droit d’aînesse à Jacob pour un plat de lentilles (peut-on céder ce qui relève du biologique ?).
Famine en Canaan. Dieu interdit à Isaac de quitter le pays pour se rendre en Egypte comme l’avait fait son père Abraham, dans les mêmes circonstances (Isaac est le seul Patriarche à n’avoir jamais quitté le pays de Canaan).

2) Isaac revit avec Rebecca ce qu’ont vécu son père et sa mère avec Avimelekh : dissimulation (Isaac fait passer Rebecca pour sa sœur), enlèvement et restitution lorsqu’il réalise qu’elle est l’épouse d’Isaac, enrichissement d’Isaac.

3) Conflits entre Isaac et les Philistins autour de puits creusés par Abraham et remplis de terre par les Philistins. Rabbenou Bah’yé, disciple de Nahmanide, y voit une allusion au monothéisme et aux valeurs morales inculqués aux hommes par Abraham, combattus par les Philistins. Deux puits font l’objet de conflits contrairement au 3ème. Nahmanide y voit une allégorie des deux Temples de Jérusalem détruits jusqu’à ce que le 3ème Temple advienne pour l’éternité.

4) Alliance entre Isaac et Avimelekh (réitération de ce qui se fit avec Abraham).

5) Le fameux passage du vol de la bénédiction paternelle par Jacob, déguisé en Esaü, sur le conseil de Rebecca. Les exégètes s’étonnent de la volonté d’Isaac de bénir Esaü, alors qu’il n’est pas dupe des agissements indignes de ce dernier (la juxtaposition des versets 35 du chapitre 26 et 1 du chapitre 27 en est la meilleure preuve).

6) Esaü veut se venger de Jacob au point de vouloir l’assassiner. Rebecca l’enjoint de s’enfuir en Mésopotamie, pour trouver refuge chez sa famille.

7) Jacob obéit à ses parents. Esaü épouse une fille d’Ismaël.

La Haftara et la Paracha :

Le prophète Malachie (dernier livre des petits prophètes) évoque la fraternité d’Esaü et de Jacob, évocation qui fait le lien avec notre Paracha, avant de stigmatiser les actes offensants pour Dieu accomplis au Temple par les descendants de Jacob, ses coreligionnaires. Le dernier verset nous enseigne que les Cohanim/ «Prêtres » jouaient le rôle d’instructeurs du peuple juif, enseignant la tradition juive aux pèlerins, en plus de leurs fonctions sacerdotales liées au Temple.

Etincelles de mémoire :

Le plat de lentilles est traditionnellement associé au deuil, y compris au deuil national observé pour la destruction du Temple de Jérusalem, commémorée à Tich’a béav. Le commentaire de Rachi est, à ce titre, très éloquent : « Abraham était mort ce jour-là… Jacob a fait cuire des lentilles pour le premier repas de deuil. Pourquoi des lentilles ? C’est parce qu’elles ont une forme ronde, le deuil est une roue qui tourne dans le monde. De plus, la lentille n’a pas de « bouche » comme une personne en deuil qui ne peut pas parler. C’est pourquoi on a coutume d’offrir aux gens en deuil un œuf pour leur premier repas. L’œuf est rond et entièrement fermé. Une personne en deuil reste également la bouche close… ». Il n’est cependant pas interdit de consommer un plat de lentilles dans d’autres circonstances que le deuil. Le lecteur peut en trouver une recette dans un ouvrage très original aux très belles illustrations : « La cuisine de la Bible » de Ruth Keenan. Menus inspirés de l’Ancien Testament. Pages 56 à 62.
Méa shéa’rim : Ce quartier orthodoxe de Jérusalem doit son nom à notre Paracha (Chapitre 26, verset 12), qui désigne par ces mots, une récolte prodigieuse, et donc, la bénédiction. Méa signifie « cent », et Shéa’rim, ne vient pas de Shaa’r qui veut dire « porte », mais de shiou’r, qui signifie « mesure », « quantité ». L’on dirait aujourd’hui, qu’Isaac fut béni au centuple.

Etincelles de réflexion :

– Vous avez peut-être entendu dire que nos Patriarches ont observé la Torah avant même qu’elle soit donnée au Sinaï. Cette affirmation se fonde sur un verset de notre Paracha : au chapitre 26, verset 5, Dieu dit à Isaac que son père a observé toutes les lois bibliques et également les lois de prévention rabbiniques. Reportez-vous au commentaire de Rachi et, pour les plus initiés, à la dernière michna du quatrième et dernier chapitre de Qiddouchin.

– La rivalité entre l’Eglise et la Synagogue serait préfigurée par le combat pour le droit d’aînesse et le droit à la bénédiction, c’est-à-dire, à l’élection, que se livrent Jacob et Esaü.

Voir aussi :
Lectures de « Toledot » (GRJO)
Du père au fils
Sur le nom de Jacob
Malachie, ange, prophète ou messager ?

Envoyez un commentaire

Vous devez être connecté pour publier un commentaire.