Les ambiguïtés de l’Omer

La parasha Emor contient la prescription sur le décompte des cinquante jours de l’Omer, qui commencent par l’offrande de l’Omer, au lendemain du Chabbat.

Lévitique 23 :
10 Parle aux fils d’Israël, et dis-leur: Quand vous serez entrés dans le pays que je vous donne et que vous en aurez fait la moisson, vous apporterez un omer (אֶת־עֹמֶר, AT-ŒMR, Ète-Omèr) des prémices de votre moisson au Cohen ;
11 et il balancera l’omèr (וְהֵנִיף אֶת־הָעֹמֶר, WHNYF AT-HŒMR, VeHényif Ète-HaOmer) devant l’Eternel, pour que vous soyez agréés; le sacrificateur la balancera le lendemain du Chabbat.

L’omer, mesure de capacité, était apparu lors du ramassage de la manne dans le désert (Exode 16). La Septante grecque et la Vulgate latine translittèrent γομορ, Gomor. Le G, Gamma rend le Ayin, comme dans Gaza, עַזָּה, ŒÇH, ou dans Gomorrhe, עֲמֹרָה ŒMRH.

En Lévitique 23, le grec écrit dragma et le latin manipulus, mots qu’on peut traduire par « poignée ». Mais d’autres utilisations de « Omer » conduisent à préférer la traduction de « gerbe » :

Deutéronome 24, 19 :
Quand tu feras ta moisson dans ton champ, et que tu auras oublié une gerbe (עֹמֶר, ŒMR, Omer) dans ton champ, tu ne retourneras pas pour la prendre

Ruth 2
7 Permettez que je glane et que je ramasse dans les gerbes (בָעֳמָרִים, BŒMRYM, BaOmerim), après les moissonneurs.
15 Qu’elle glane même entre les gerbes, et ne lui en faites pas de reproche (בֵּין הָעֳמָרִים, BYN HŒMRYM, Beyn HaOmerim).
A noter Ruth 2, 17, « et il y eut environ un épha (כְּאֵיפָה, KAYFH) d’orge ». Or l’omer est un dixième d’epha (Exode 16, 36).

Le premier « lendemain de Pessa’h » intervient à l’entrée en Canaan, quand la manne s’arrête et que les Enfants d’Israël mangent le « blé du pays ». (Josué 5, 10-12). Philon et Josèphe citent la date de l’offrande de l’ômer d’orge, le lendemain du premier jour de Pessa’h. Mais les Sadducéens, dit le traité Menahot (65 a, sqq.), estimaient qu’il fallait prendre les mots « lendemain du Chabbat » à la lettre, de sorte que l’offrande de l’ômer avait lieu toujours un dimanche, de même que la fête de Chavouot, sept semaines plus tard, opinion adoptée ou conservée par les Karaïtes.

Les Évangiles transformant Pessa’h en Pâques (la commémoration de la Sortie d’Egypte en celle de la Passion et de la Résurrection), les Actes des Apôtres transformant Chavouot en Pentecôte, (le don de la Torah en le don des langues), la période intermédiaire des cinquante jours, dans la Torah celle du don de la manne et de la lutte de Josué/Jésus contre Amalek, changea complètement de signification. Le balancement (tenoufa) de la gerbe, également pratiqué à Soukkot (Loulav) et Hochana Rabba, évoque celui du Dimanche des Rameaux. Les Sages de l’époque ne purent que constater cette dérive, ce qui pourrait expliquer la mention dans le Talmud de la disparition, pendant la période de l’Omer, des 24 000 disciples de Rabbi Akiba, qui symboliserait alors la déjudaïsation de la Judée après la révolte de Bar Kochba.

Cette explication justifie le deuil qui continue d’être respecté de nos jours pendant cette période, et l’importance accordée au décompte quotidien de l’Omer. Mais aussi la rédaction de la Haggadah du Seder de Pessa’h, garante de la conservation du souvenir de la Sortie d’Egypte.

Une réponse à “Les ambiguïtés de l’Omer”

  1. Yehoshua LEVY dit:

    Le deuil qui va du lendemain de Pessa’h à Lag Baomer commémore la mort des 24.000 élèves de Rabbi Akiba qui se jalousaient et ne se respectaient pas les uns les autres.

    Soit, mais le grand rabbi Akiva est mort lui-meme lors de la révolte de bar Kosibah que lui-meme avait désigné comme Bar Kochbah, le fils de l’Etoile annoncé comme le rédempteur de Jacob.
    Cette révolté de l’an 135 a vu la destruction de Bétar et ce qui restait de Jéusalem ainsi que l’esclavage et la déportation deu peuple d’Israel.

    Or, de cela, il n’y a pas de commémoration. On peut donc se lamenter du deces de 24.000 élèves mais pas du Maitre et de tout le peuple d’Israel ?

    On peut penser qu’à la suite de cette Tragédie, le Talmud condamne définitivement toute révolte militaire et politique.
    Il ne pouvait pas commémorer la mort de R Akiba et ceux qui l’avaient suivi.

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