Éloge de la Bible hébraïque

Le texte biblique hébreu est d’une grande beauté …

<< Le texte biblique hébreu est d'une grande beauté, et d'un non moins grand mystère ; la syntaxe est d'une étonnante simplicité, juxtaposant les mots sans en expliciter la relation logique, avec des effets frappants ; le lexique est simple ; les mots, peu nombreux, sont riches de plusieurs sens, ils tiennent en eux, en "prégnance", plusieurs notions et suscitent des associations d'idées ; les phrases ont en elles des jeux sonores de consonnes et sont rythmées par des chiasmes ou des parallélismes ; les noms propres donnent des effets de sens par des jeux étymologiques ... On ne se lasse pas de faire l'éloge de l'hébreu, antique langue vénérée, dense, mystérieuse, qui rend la Bible belle à entendre, étrange et souvent obscure, mais que ses mots polysémiques rendent ouverte à l'imagination. La Bible semble unique, hiératique, intraduisible ; nul ne songe à l'abandonner, et pourtant...

Tout de suite après cette Bible hébraïque, arrive cette autre Bible qui en est une version en grec, la Septante (…) Le grec de la Septante crée un langage biblique tout autre que celui de l’hébreu, mais il donne aussi à la Bible une belle forme littéraire, toutes les qualités du grec sont là, sa force, sa clarté, sa précision. Si le grec perd inévitablement les sonorités et le rythme de l’hébreu, il crée d’autres jeux sonores, des allitérations, des rimes ; certains livres sont de moindre qualité, leur langue est maladroite ; d’autres sont agréables à lire, avec de belles images, des mots qu’a embellis leur usage poétique ancien dans la littérature gracque. Mais ce qui est le plus remarquable, c’est que le grec rend l’hébreu par un langage de logique, ce qu’Emmanuel Levinas a appelé « une langue de la raison ». >>

Marguerite Harl, La Bible en Sorbonne ou la revanche d’Erasme, Cerf, 2004, p. 203-204

2 réponses à “Éloge de la Bible hébraïque”

  1. mllevy dit:

    Marguerite Harl, La Bible en Sorbonne ou la revanche d’Erasme, Cerf, 2004

  2. mllevy dit:

    Voir aussi
    Sur le verbe « Paqad »
    Six ou sept jours ?
    Une assemblée de peuples

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