Un sacrifice virtuel

L’État commence à l’état civil

Chaque futur père se dit “quelque part” que le moment de plaisir qu’il a eu ne justifie pas de s’engager sa vie entière envers cet éventuel enfant. C’était “pour rire” !

Or Abraham ne se souvient pas avoir jamais « connu » Sarah. Quand ALHYM, Elohim lui demande de lui sacrifier Yts’haq, Isaac, YZEQ, « On rira », il accepte ce désaveu de paternité : ce faisant, il reconnaît Celui Qui l’a fait père ! Et comme l’enfant, précisément, montant au sacrifice, au verset 22, 7, …
וַיֹּאמֶר יִצְחָק אֶל־אַבְרָהָם אָבִיו וַיֹּאמֶר אָבִי וַיֹּאמֶר הִנֶּנִּי בְנִי
WYAMR YZEQ AL-ABRHM ABYW WYAMR ABY WYAMR HNNY BNY
VaYomère Yts’haq El-Avraham Aviv, VaYomère : Avi, VaYomère : Hinèni Beni
Et il dit Isaac à Abraham, son père : il dit Mon père! Et il dit: Me voici, mon fils!
… l’appelle ABY, Avi, « mon père », et que lui répond BNY, Beni, « mon fils », père et fils se sont ainsi reconnus mutuellement.

Mais quand il lève son couteau, Abraham se souvient que ce même couteau a circoncis Isaac ; il le reconnaît alors non seulement comme son fils, mais aussi comme son fils légitime, selon la loi (1). L’ange de YHWH, sa conscience, lui crie alors, au verset 12, de « ne pas étendre sa main ».

C’était Elohim qui “éprouvait” Abraham en lui demandant de sacrifier Isaac. Mais c’est YHWH, qui, au verset 18, félicite Abraham. Cette fois c’est Dieu qui a changé de nom ! « Parce que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai, je multiplierai ta semence comme les étoiles du ciel, comme le sable sur les lèvres de la mer. Toutes les nations de la terre (KL GWYY HARZ, Kol Goyé Haarets) se bénissent en ta semence parce que tu as entendu ma voix ».

A qui un père déclare-t-il un fils au bureau de l’état civil ? À un fonctionnaire ? Ou bien à une nation, à un pays, à un État ? Abraham sacrifiant Isaac, ou plus précisément « ligotant » Isaac (les rabbins ne parlent pas du “sacrifice d’Abraham”, mais de la ligature d’Isaac), c’est un père déclarant la naissance de son fils.

Ce fils est coincé, il est ligoté ! Un État assure protection à ses citoyens mais leur demande en retour, non seulement de respecter les lois, mais aussi d’être prêts, dans des cas aussi rares que possible, à prendre le risque de « mourir pour la patrie ». C’est un sacrifice virtuel.

(1) Ce rapprochement est de Marie Balmary, in “Le sacrifice interdit, Freud et la Bible” (Grasset, 1993)

Voir aussi : Naissance de la nation

Une réponse à “Un sacrifice virtuel”

  1. mllevy dit:

    En hébreu dans le Texte.
    Sommaire

    Voir aussi :
    Translittération

    Le Précepteur. Comment Moïse entreprit la Bible (Bookelis)

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