Foule et multitude

En Genèse 17,5 Elohim change le nom d’Abram ABRM en Abraham ABRHM. Ce calembour divin n’a rien de limpide.

« On ne t’appellera plus Abram; mais ton nom sera Abraham, car je te rends père d’une multitude de nations. » Voyons le texte hébreu.
וְלֹא־יִקָּרֵא עוֹד אֶת־שִׁמְךָ אַבְרָם וְהָיָה שִׁמְךָ אַבְרָהָם כִּי אַב־הֲמוֹן גּוֹיִם נְתַתִּיךָ׃
WLA-YQRA ŒWD AT-SMK ABRM WHYH SMK ABRHM KY AB-HMWN GWYM NTTYK
VeLo-Yiqra ‘Od Ète Chimekho Abram veHayé Chimekho Abraham Ky Ab-Hamon Goym Netatykha

Le jeu de mots (de lettres, plutôt) réside dans אַב־הֲמוֹן גּוֹיִם, « Père (אַב, AB, Ab) d’une multitude (הֲמוֹן, HMWN, Hamon) de nations (גּוֹיִם, GWYM, Goyim) » : grâce au H ajouté, les deux premières lettres de HMWN coïncident avec les deux dernières d’ABRHM.

AB, c’est bien « père »; GWYM, c’est bien « nations »; mais HMWN, est-ce bien « multitude » ? Samuel Cahen traduit par « foule », mais la traduction latine dit « pater multarum gentium« , père de beaucoup de nations, et c’est apparemment ce multarum qui a inspiré « multitudes », auquel s’est ralliée la traduction du Rabbinat.

Dans la Torah, HMWN n’apparaît qu’ici et au verset précédent. Chez les Prophètes, il rend le plus souvent un bruit ou un grondement indistinct, celui du torrent, de l’orage ou de … la foule. « Père du grondement des nations » ? Abraham devient le père des nations en tant que nations, du concept même de « nation ».

Lors de la ligature d’Isaac, le mot « patrie » conviendra mieux. Présentant son fils au sacrifice, Abraham agira comme les pères qui, venant déclarer leur fils à l’état civil, prennent le risque qu’un jour, il soit appelé à « mourir pour la patrie ».

Voir
Une multitude de nations

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